Militaires et politiques sont divisés sur la stratégie
Mais le pouvoir et les responsables militaires russes semblent divisés sur la stratégie à suivre. ” Nous avons plusieurs versions de plans d’opérations terrestres qui seront appliqués en fonction de la situation “, expliquait hier Igor Sergueïev, ministre russe de la défense. A Moscou, certains estiment que les bombardements pourraient préluder à une offensive terrestre d’envergure et des troupes fédérales sont actuellement massées autour de la République.
Les derniers bombardements russes se sont concentrés sur Grozny et sa périphérie, touchant les aéroports civil et militaire, la zone industrielle, la télévision et le seul émetteur de téléphonie cellulaire de Tchétchénie. Plusieurs dizaines de civils ont été tués.
Le passage par la frontière ingouche, fermée par les Russes samedi soir, était la dernière voie que pouvaient emprunter les réfugiés tchétchènes pour fuir leur pays, Moscou ayant fermé un peu plus tôt les frontières de la Tchétchénie avec le territoire de Stavropol et le Daguestan. Environ 20 000 réfugiés tchétchènes avaient déjà trouvé refuge dans l’Ingouchie voisine, laissant craindre un prochain désastre humanitaire dans cette République autonome.
La plupart des réfugiés sont des femmes, des enfants et des personnes âgées, qui ont traversé la frontière à pied pour éviter les contrôles aux postes frontières où les files d’attente de véhicules, côté tchétchène, s’étendaient sur 15 km avant la fermeture de la frontière.
En Ingouchie se sont réfugiés des Ossètes et des Tchétchènes
L’Ingouchie, membre de la Fédération russe, faisait partie de la République d’Ingouchie-Tchétchénie à l’époque soviétique. Quelque 400 000 Ingouches de souche vivent aujourd’hui dans la République autonome qui compte de nombreux réfugiés originaires d’Ossétie ou venus de Tchétchénie pendant la guerre russo-tchétchène.
De son côté, le président tchétchène Aslan Maskhadov s’est dit prêt à ” recevoir des inspecteurs de l’ONU et d’autres organisations internationales pour qu’ils vérifient sur place l’absence de terroristes et de bases terroristes sur le territoire tchétchène “. Il a renouvelé ses appels en faveur d’une négociation politique, faute de quoi il pourrait être amené à ” changer de méthode de résistance “. Mais tous les contacts politiques entre Moscou et Grozny semblent être coupés.
La Russie accuse la Tchétchénie de servir de base arrière aux combattants islamistes de Chamil Bassaev et du ” commandant ” Khattab qui prépareraient de nouvelles opérations dans la République voisine du Daguestan. La guérilla tchétchène est également soupçonnée d’être derrière la vague d’attentats terroristes qui a fait près de 300 morts en Russie depuis le 31 août dernier.
François d’ALANCON
La Croix
MONDE, lundi 27 septembre 1999, p. 8