Les militaires russes, particulièrement le premier d’entre eux, le ministre de la défense, Pavel Gratchev, passent pour ne pas vouloir d’accord politique pour rétablir la paix en Tchétchénie. Ils préféreraient une fin plus « glorieuse », une victoire militaire « totale », des récompenses, des grades, des crédits, plutôt que de devoir rendre des comptes pour la « sale guerre » menée dans le Caucase. Ils ont fait, font et feront tout leur possible dit-on à Moscou pour que les pourparlers engagés depuis le 21 juin échouent. Les événements du vendredi 7 juillet font-ils partie de leurs efforts ?

La question était posée, à Moscou, après le massacre visiblement planifié , vendredi à Grozny, de huit membres d’une même famille par « des hommes portant des uniformes russes » et arrivés en blindé. Des « sources bien informées et haut placées », chez les militaires russes, ont bien tenté de faire croire que ces meurtres, dont ceux de deux enfants et d’un nouveau-né, étaient une « provocation classique » des Tchétchènes eux-mêmes. Mais le mystérieux massacre le blindé n’avait pas de signe de reconnaissance, les tueurs étaient masqués et ont sans doute utilisé des silencieux ressemble plus à une tentative des militaires russes pour faire dérailler le processus de paix en Tchétchénie.

Le même jour, un incident plus classique illustrait le comportement ordinaire des troupes russes dans la petite République : quatre soldats russes ont tué, dans un sovkhoze de la banlieue de Grozny, un Tchétchène qui n’avait pas de vodka à leur donner, avant de mitrailler les environs, tuant un autre Tchétchène et en blessant trois autres.

Sous la pression de la population, qui manifeste en permanence devant le siège de la mission de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), où se tiennent les pourparlers, les négociateurs tchétchènes ont obtenu la création d’une commission d’enquête mixte sur le massacre de la famille. Après que la délégation eut menacé de suspendre les négociations en cours, celles-ci ont repris, samedi matin, à Grozny. Les deux délégations ont déclaré, dans un communiqué conjoint, que « ces actes barbares sont le fait d’éléments qui tentent de briser le cours des négociations de paix en Tchétchénie ».

Le même jour, une autre « provocation », largement attribuée au ministre russe de la défense, avait fait long feu. Devant le mécontentement des médiateurs russes à Grozny, Boris Eltsine a modifié son oukaze de mardi édictant un déploiement permanent de l’armée russe en Tchétchénie.

Selon la nouvelle version du texte, le ministère russe de la défense est maintenant chargé de « déterminer les conditions du déploiement des troupes » mais « en fonction des résultats du règlement de la crise » en Tchétchénie.

JEAN-BAPTISTE NAUDET

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