Au moment où s’ouvre, vendredi 7 juillet, le troisième round des négociations en Tchétchénie, le président russe vient de nommer le général Koulikov, chef des opérations militaires dans la petite République mais aussi l’un des négociateurs de paix à Grozny, au poste de ministre de l’intérieur. Pourtant, à en croire la délégation russe, les négociations s’annoncent sous les meilleurs auspices. « Je suis convaincu que les pourparlers finiront par un succès », a déclaré jeudi Nikolaï Semenov, membre de la délégation russe et représentant civil de Moscou en Tchétchénie. Pourtant, dans la capitale russe, les signes d’une contre-offensive du « parti de la guerre » et de son héros, le ministre de la défense, Pavel Gratchev, s’accumulent.

Sur le terrain, les forces russes poursuivent les bombardements, malgré le cessez-le-feu décrété pendant les négociations, selon l’envoyé spécial de l’AFP. Accusant les indépendantistes tchétchènes de « ne pas observer les conditions du moratoire », l’état-major des forces russes en Tchétchénie a annoncé, jeudi, que trente militaires russes avaient été tués et cent trente-deux blessés depuis l’accord sur le cessez-le-feu, le 21 juin. Pour rafraîchir encore l’atmosphère, Chamil Bassaev, le chef du commando tchétchène qui avait pris en juin des centaines d’otages à Boudennovsk, a menacé, dans une interview à l’AFP, d’utiliser des armes radioactives ou bactériologiques contre la Russie si les pourparlers de Grozny échouaient. « Un demi-kilo d’uranium sur Moscou et cette ville cessera d’exister », a-t-il déclaré.

Signe que la lutte entre partisans et ennemis des négociations est toujours en cours à Moscou, les déclarations les plus contradictoires abondent, tandis que les nouvelles nominations de ministres font l’objet d’analyses divergentes. Après avoir épargné son fidèle ministre de la défense, Pavel Gratchev, le président Eltsine a promu, jeudi, le général Anatoli Koulikov, connu pour sa poigne, à la tête du ministère de l’intérieur. Ajoutant à la confusion, le porte-parole du Kremlin a fait savoir, jeudi, qu’il n’était pas question d’annuler ou de modifier le décret, signé mardi par le président Eltsine, sur un présence permanente de l’armée russe en Tchétchénie. Pourtant, les négociateurs russes avaient dénoncé ce décret dont les Tchétchènes avaient d’ailleurs appris l’existence avant eux , susceptible à leurs yeux de faire dérailler le processus de paix. Ils avaient déclaré avoir reçu « des assurances » que le texte serait annulé ou modifié.

L’hypothèse pessimiste veut que le « parti de la guerre » renoue avec son habitude de saboter les négociations. Selon l’hypothèse optimiste, le président Elstine donnerait par ces décrets et nominations quelques gages et récompenses aux « durs », contraints cependant d’accepter la perspective d’une paix en Tchétchénie.

JEAN -BAPTISTE NAUDET

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