Ce semi-échec a ainsi montré que les forces russes refusent toujours de cesser leurs opérations militaires au profit de pourparlers politiques. C’est ce qu’a pratiquement reconnu le représentant civil de Moscou en Tchétchénie, Nicolaï Simionov, en déclarant : « Nous avons des problèmes difficiles à résoudre » pour que les négociations reprennent. Moscou « n’est pas encore prêt à arrêter le meurtre de la population pacifique », a estimé, de son côté, le négociateur tchétchène, Ousman Imaïev, en quittant les pourparlers. Il a affirmé que la partie tchétchène était, elle, « prête à arrêter les activités militaires ». Malgré les appels au cessez-le-feu de l’OSCE, le commandant des troupes de Moscou en Tchétchénie, le général Mikhaïl Egorov, avait annoncé une « vaste offensive » à la veille de ces discussions, après s’être opposé au prolongement de la trêve décrétée par Boris Eltsine pour les commémorations du 9 mai.
VICTOIRES À LA PYRRHUS
Ces négociations ont aussi souligné que les « succès militaires » russes étaient sans doute des victoires à la Pyrrhus : en territoire reconquis par Moscou, les indépendantistes tchétchènes disposent, semble-t-il, d’un fort soutien politique, si ce n’est militaire. En effet, alors que ces pourparlers se déroulaient à Grozny, territoire « contrôlé » par Moscou, une centaine de manifestants ont défié les autorités russes en se rassemblant devant le pavillon de l’OSCE où se tenaient les pourparlers, en criant le prénom du président Doudaev, « Djokhar ! Djokhar ! », et en brandissant des banderoles proclamant : « La liberté ou la mort ! ».
Il semble que les autorités russes commencent à se rendre compte qu’il n’y a pas de solution militaire à la crise tchétchène. En tout cas, pour la première fois, elles paraissent envisager un « désarmement » qui ne serait pas une pure et simple reddition des indépendantistes. Le communiqué publié par le gouvernement russe, à l’issue de la rencontre de jeudi, indique que « les parties ont exprimé la volonté d’arriver à un accord pour aller vers un cessez-le-feu et un désarmement ». Ce qui ne plairait sans doute pas aux partisans de la guerre, qui l’ont emporté jusqu’à présent, tant du côté tchétchène que russe.
JEAN-BAPTISTE NAUDET