La visite qu’ont effectuée, le jeudi 26 janvier à Washington, le ministre français des affaires étrangères, Alain Juppé, et le commissaire européen chargé de la politique commerciale, Leon Brittan, n’a pas apporté de solutions concrètes aux différends entre les Etats-Unis et l’Union européenne sur les questions commerciales. Mais elle a permis de constater un net rapprochement avec Paris sur la Bosnie, la Tchétchénie et l’Algérie.

M. Juppé, qui a rencontré le secrétaire d’Etat Warren Christopher et le conseiller de Bill Clinton pour les affaires de sécurité nationale, Anthony Lake, a constaté une « prise de conscience plus claire » du fait que, dans la « mouvance islamiste » en Algérie, existe une composante terroriste « avec laquelle le dialogue n’a pas de sens ».

S’agissant de la Bosnie, le ministre a souligné que des « progrès réels » ont été accomplis : le cessez-le-feu est « à peu près respecté, à part à Bihac, et parfois autour de Sarajevo ». La liberté de manoeuvre de la Force de protection des Nations unies (Forpronu) est, dans l’ensemble, rétablie, et plusieurs pays, dont la France, s’emploient à la renforcer par des contingents supplémentaires. Les prochains mois seront cependant « décisifs » et Paris voit au moins trois motifs d’inquiétude : l’expiration du mandat de la Forpronu fin mars en Croatie, l’échéance du cessez-le-feu fin avril qui coïncide avec le début du printemps, période traditionnelle de recrudescence des combats, enfin la pression du Congrès en faveur d’une levée de l’embargo sur les armes.

« RÉCONCILIATION POLITIQUE »

Washington est d’accord avec Paris et Londres pour relancer rapidement les négociations malgré l’échec récent du groupe de contact. Il s’agirait de provoquer un « choc », qui pourrait prendre la forme, à terme, d’une nouvelle conférence internationale. La France a noté avec intérêt la mission entreprise par l’envoyé spécial américain Charles Thomas à Pale (la « capitale » des Serbes de Bosnie), qui tranche avec la position passée de Washington, systématiquement favorable aux Musulmans.

Le gouvernement américain, pour sa part, est convaincu des dangers que représenterait une levée de l’embargo, réclamée par les républicains. A propos de la menace d’une suppression de la contribution financière américaine aux opérations de l’ONU, M. Juppé a déclaré : « Voir un pays comme les Etats-Unis s’exonérer des résolutions du Conseil de sécurité constituerait un événement d’une très grande portée internationale », a-t-il insisté. Warren Christopher a tenu le même discours, jeudi, devant la commission des relations internationales de la Chambre des représentants.

S’agissant du conflit tchétchène et des relations avec la Russie, Français et Américains sont d’accord pour considérer Boris Eltsine comme le garant des réformes et « personne n’a l’intention de remettre en cause l’intégrité et la souveraineté de la Russie », a souligné M. Juppé. Le ministre des affaires étrangères a noté cependant que Moscou n’a pas tenu ses engagements sur le respect des « droits de l’homme et des principes démocratiques ».

Si les Américains emploient un ton moins ferme, les deux pays sont d’accord pour souhaiter un arrêt des hostilités, et, comme l’a déclaré jeudi Bill Clinton, un processus de « réconciliation politique ».

LAURENT ZECCHINI

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