Commandant du bataillon d’élite des forces du président Djokhar Doudaev, Chamyl Bassaev, trente ans, le plus respecté des chefs de l’« armée » tchétchène, souhaiterait « un peu moins d’indiscipline » mais explique que les Tchétchènes n’ont pas l’habitude de se laisser donner des ordres. Il parle de ses hommes, pour la plupart des volontaires, qui, « lorsqu’ils ont attendu deux heures à leur poste, où il ne se passe rien, le quittent en entendant que ça tire dans le quartier d’à côté, pour aller en découdre ». « Certains, dès qu’ils font un prisonnier, l’emmènent chez eux et tout le village défile dans le salon pour venir le voir », raconte-t-il.

Non loin de Grozny, sur l’ancienne base militaire soviétique où le commandant Bassaev a installé son quartier général, l’ambiance est détendue : « Regardez ! Nous avons un trophée de plus ! », lancent, en riant, deux combattants qui déboulent d’un camion qu’ils viennent de prendre aux Russes. Toute la base est d’ailleurs pleine de « trophées ». Depuis les filets de camouflage jusqu’aux trois chars sur lesquels flotte le drapeau tchétchène : tout a été pris aux Russes.

Convaincu que les Russes « ne peuvent pas vaincre », Chamyl Bassaev reconnaît aussi que beaucoup de Tchétchènes y laisseront leur vie. « Si nous avions une vraie discipline, nous tiendrions encore le centre », relève-t-il avec regret. Puis, il évoque, en riant, l’abandon du palais présidentiel, jeudi 19 janvier : « Les Russes ont mis des heures à s’apercevoir que nous étions partis. Quand ils y sont entrés, ils étaient si contents, qu’ils le redisaient toutes les deux minutes à la radio ! Si on avait su que ça leur faisait tellement plaisir, on le leur aurait laissé plus tôt .»

ISABELLE ASTIGARRAGA ET MARIELLE EUDES

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