” Frapper et se retirer, frapper et se retirer ; c’est la tactique séculaire des montagnards, les épuiser jusqu’à ce qu’ils meurent de peur et d’horreur. ” Djokhar Doudaev, l’intransigeant président de la petite République indépendantiste de Tchétchénie, a lancé, mardi 13 décembre, un encouragement à ses maigres troupes, qui tentent de stopper, par des harcèlements, la progression d’une armada de chars et de troupes russes.

Quelques heures plus tard, la délégation tchétchène quittait, mercredi matin, les négociations ” de la dernière chance ” entamées avec les Russes, dans la République voisine d’Ossétie du Nord. Moscou a exigé que la Tchétchénie reconnaisse son appartenance à la Fédération russe, ce que les délégués de Grozny ont refusé. Le président Doudaev a qualifié de ” farce ” ces pourparlers : ” Il est inacceptable de mener des négociations pendant qu’on bombarde des localités civiles “, a-t-il déclaré.

A la veille de l’expiration d’un ultimatum du Kremlin aux sécessionnistes tchétchènes, et malgré deux jours de violents combats, les forces russes avaient resserré, mercredi, leur étau autour de Grozny, la capitale de la petite république caucasienne du sud de la Fédération de Russie.

Moscou a multiplié les déclarations guerrières tandis que ses forces rencontraient de sérieuses difficultés sur le terrain. Le premier ministre russe, Viktor Tchernomyrdine, a rappelé que Moscou ” demandait pour l’instant gentiment ” aux Tchétchènes de rendre les armes, mais qu’ils devaient obtempérer d’ici au jeudi 15 décembre _ date butoir d’un oukaze présidentiel d’amnistie. Le ministre russe des affaires étrangères, Andreï Kozyrev, a déclaré que la Russie utiliserait ” toute la force nécessaire “, tandis que l’agence ITAR-TASS annonçait que les forces russes _ au moins de 20 000 hommes et 300 blindés soutenus par des hélicoptères et des avions de combats _ avaient reçu l’ordre d’encercler Grozny.

Mais la progression des colonnes blindées russes se heurte à l’opposition, pacifique ou armée, de la population tchétchène. Les forces indépendantistes creusent des tranchées, mettent le feu à des barricades érigées sur les routes, attaquent les blindés à l’artillerie. Des affrontements armés sont signalés dans plusieurs localités, où les forces russes répliquent par des assauts d’hélicoptères et d’avions de combats. Ces affrontements ont fait un nombre indéterminé de morts et de blessés. L’armée russe a, pour sa part, reconnu, mardi, avoir eu onze morts et vingt blessés dans les trois premiers jours de combats.

A une cinquantaine de kilomètres à l’ouest de Grozny, un général russe a ordonné, de sa propre initiative, à ses chars venant d’Ingouchie de stopper leur avance. Près de 500 manifestants sans armes s’opposaient à leur progression. Près de la frontière ingouche, des journalistes ont été pris pour cible par des soldats russes, qui ont ouvert le feu sur leur véhicule, sans faire de victime, avant de prendre leur matériel. L’envoyé spécial de France 2, Dominique Derda, s’est fait confisquer ses images par les forces russes. Un photographe de presse a été blessé lors de combats.

A Moscou, la Douma, chambre basse du Parlement, a refusé de prendre une position claire sur l’intervention armée russe en Tchétchénie. Les députés se sont contentés de juger ” insuffisants ” les efforts du Kremlin pour trouver une solution pacifique à la crise tout en estimant vitale l’intégrité territoriale de la Fédération russe. _ (AFP, Reuter)

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